processus.
Mon travail est en grande partie régi par une réflexion sur la construction, l’édification d’objets aux géométries souvent très architecturées, forme de trace de l’Homme, mais pouvant aussi devenir plus libres, évoquant plus littéralement les formes organiques issues de la nature.
Ce processus créatif à la fois lent et méditatif, se construit en plusieurs étapes, de l’idée qui émerge souvent par un mot, une abstraction, à sa traduction en croquis.
L’idée émergente est notée sur le moment.
Parfois il peut se passer une longue période avant de réaliser concrètement une idée, pour que le projet décante, pour envisager mentalement sa construction, pour trouver un dessin satisfaisant.
Suivant le projet, la réflexion se poursuit alors par la “ géométrisation ” du croquis et le dessin d’un patron guidant le travail lors d’un modelage par plaques.
Mais le moment où les mains touchent la terre devient un moment d’évasion de l’esprit. Un moment de liberté pour les mains, s’autonomisant presque de la réflexion amont.
Chaque pièce fait alors l’objet d’un ajustement instantané lors du façonnage.
Dans ce processus, les pièces créées ne sont pas forcément toutes émaillées.
J’aime le ressenti de la matière laissée brute, une façon de laisser lisible, préhensible, le matériau, la matière terre et ce qu’elle nous offre. Comme une sorte de contraste, ou plutôt d’échange, entre des formes très architecturées et une matière laissée au maximum en son état originel.
A contrario, les projets plus organiques, deviennent ceux où la question de l’émaillage, prend une place souvent plus importante. Les émaux expriment la présence de l’Homme sur ces formes plus libres, sans pour autant cacher la matière d’origine. Ils la révèlent sous un prisme différent.
Le travail avec les émaux laisse alors une certaine part d’imprévu. Cette part d’incertitude dans le dialogue entre la terre et l’émail est aussi ce qui m’intéresse et ce qui procure un caractère propre à chaque pièce produite.
Mes créations sont toutes faites main, au modelage avec peu d’outils pour un retour au toucher et à la matière brute. Chaque objet est ainsi unique et a ses propres caractéristiques.
séries.
travail sur la série.
Série — ensemble composé d’éléments de même nature ou ayant entre eux une unité.
Très vite, je me suis intéressée au travail sur la série, certainement au départ comme un moyen de travailler, tester et approfondir des techniques, de réfléchir à des variations autour d’une même thématique de projet. Mais cette réflexion est également venue de la volonté d’un travail autour de la question du groupe — parallèle à la société —, et de l’unité — l’individu.
Un travail à différentes échelles.
Ce travail me permet de créer et développer des objets uniques tout en ayant un lien de parenté au sein d’une même série. Chaque série développe son propre univers, lié à la géométrie, à la matérialité.
architecture . nature.
Mes projets sont toujours pensés dans un dialogue entre architecture — l’architecture et le design de l’objet —, et la nature. Une nature qui offre une matérialité aux objets et/ou qui s’invite pour faire partie prenante des créations.
Les formes construites se constituent de jeu de lignes, de géométries et de reliefs évoquant à la fois l’urbain, l’architecture et l’Homme, mais également l’architecture du sol de la Terre. Cette réflexion porte ainsi sur l’équilibre de l’objet, sa construction et composition : « des objets dans l’objet », des porte-à-faux, des promontoires ou éperons.
Pour faire écho au vivre ensemble que je souhaite décliner à l’échelle de l’objet — pensée issue de mon travail sur l’urbain —, ma réflexion s’est également portée sur l’assemblage, l’emboîtement. Chaque objet créé est une unité, une entité, mais qui forme un tout et une cohérence d’ensemble dans son association avec les autres.
Une entité à la fois autosuffisante et interdépendante des autres entités de la série. Une évocation de la société et du bien-être ensemble.
La plupart des séries développées, propose une certaine rigueur de la composition, un équilibre des volumes, un rythme dans les lignes de force. Cependant certaines proposent un travail de la main sur le matériau plus libre, plus organique et moins contrôlé par des esquisses préalables.
Mon travail propose alors une sorte de progression, de gradient dans le dialogue homme . architecture . nature : de séries très construites, d’une présence assez forte, assez sculpturale, à des séries plus organiques où la nature semble dicter le travail même de la main, en une sorte de mimétisme, en passant par des séries évoquant la société humaine.
©julialaposegourmande
©marie deshaye